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club-vacances

 

En club de vacances, qu’il est bon de contempler la joie de vivre qui rayonne aussi fort que le soleil. Les humains se sentent bienveillants, allongés à l’ombre d’un parasol en vrai raphia et non pas à la solde d’une marque de boissons gazeuses qui rend heureux. Ici un grand-père d’enfants métis échange un sourire complice avec le père européen d’une fille asiatique. Là une famille de rouquins bardés de T-shirts et de chapeaux couvrants joue à la balle avec des mines d’extase, proches de celles d’une congrégation baptiste écoutant un prêtre emphatique les envouter. 

Deux amoureux de vingt ans sont dans l’eau et tellement collés l’un à l’autre que leurs ventres sont encore secs. Ces deux jeunes filles qui se crèment en gloussant font naître dans l’imagination des cerveaux masculins l’envie de remplacer leurs mains par les leurs. Un vacancier ne les quitte pas des yeux, avec l’œil libidineux d’un boucher charcutier de village qui déshabillerait du regard la nouvelle jeune institutrice. 

La vie est belle n’est ce pas ? Peut-être pas tout à fait pour cette dame blonde qui veut faire dix ans de moins, mais qui porte pourtant sur son visage et surtout dans son regard, les traces des envies qu’elle ne peut plus satisfaire. Alors c’est peut-être cela le bonheur dans notre société occidentale : amour, sexe, et envies à satisfaire. 

Mais tout cela fonctionne cependant grâce aux jardiniers qui transpirent en ramassant le moindre pétale de fleur tombée des massifs luxuriants, aux videurs de poubelles qui traquent le plus petit mégot avec un bonjour cotonneux de sommeil et à la femme de ménage qu’on ne voit jamais et qui sculpte les serviettes de toilette pour en faire des cygnes ou des cœurs. 

Jeux piscine ! Aquagym ! Les jeunes femmes alanguies comme des stars sur leurs transats sont sollicitées par des animateurs finement musclés et follement enthousiastes, avec une persuasion tellement candide qu’ils font fondre la plupart d’entre elles. Leur ardeur est proportionnelle au bronzage et aux mensurations des dites demoiselles, ainsi qu’à l’absence de mâles sourcilleux dans leur entourage immédiat. Il s’agit d’activités hautement intellectuelles puisqu’il faut monter sur des planches de surf, muni d’une grande frite en mousse et frapper son adversaire jusqu’à ce que chute s’en suive dans l’eau à 29°C. 

A quelques minutes de là en avion, ou quelques jours en chameau, d’autres violences bien moins enfantines font tomber d’autres humains, tout aussi beaux, tout autant remplis d’amour et de bien plus d’espoir. Ils ont bien plus mal en tombant dans le sable qui absorbe avidement leurs larmes et leur sang, en faisant disparaître toutes les traces de leurs tourments. Ils ont aussi le « tout compris » avec coups à toute heure, travail sans limite et égalité de traitement pour tous. On y danse toute la journée, mais en courbant l’échine. 

Les hommes, les femmes et les enfants travaillent sans primes, s’habillent sans frime et vivent sans clim. Certains en appellent à leurs dieux, mais ces derniers n’ont pas assez d’amour à donner, malgré leur nombre et la place disponible dans les cieux. D’autres répondent par encore plus de violence pour conquérir des droits qui ne devraient pas à avoir besoin d’être définis comme tels. 

Alors amour, sexe, fraternité, respect et liberté d’un coté, violence, terreur, colère, obscurantisme, et asservissement de l’autre ? C’est évidemment plus complexe. Les sociétés dites évoluées, qui surfent sur le bonheur apparent et zappent sur les plaisirs éphémères, appuient dans leur démocratie sur des leviers qui régulent surtout leurs envies et non leurs besoins. Tandis que les autres, celles appelées « en voie de développement », aspirent surtout à quitter le stade de la survie. 

Le bar thermal de la piscine vient d’ouvrir. Un esprit créatif comme il en fourmille dans le marketing politiquement correct a accouché de ce libellé associant bonne conscience et plaisir. Oui bien sûr, la qualité de l’eau est fondamentale pour fabriquer la vodka et le whisky.

Mais les larmes sont toujours trop salées.

 

Crédit textes et photos : © Emmanuel Cockpit


Tag(s) : #Humeurs
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